Le cadre réglementaire du secteur de la grande distribution (loi Raffarin et loi Galland-réformée) est loin d'être idéal et a généré d'importants effets pervers. Il est tout aussi vrai que ce secteur très concentré n'est sans doute pas soumis à la pression concurrentielle maximum. Pourtant, les propositions de la commission Attali me mettent mal à l'aise. Une fois de plus, ne risque-t-on pas, (sous prétexte de distribuer du pouvoir d'achat par la baisse des prix à défaut de le faire en augmentant les salaires) d'ouvrir une boîte de Pandore aux effets indirects mal anticipés ?
Premier élément de réaction, ma réponse à la question posée par Valérie Secong "plus de concurrence dopera-t-il la croissance" dans La Tribune du 18 octobre 2007, dont voici le texte :
Non : " Sur un marché déjà très équipé, cela entraînera des fermetures " (Philippe Moati)
"Concernant la loi Raffarin, si la libération peut effectivement, localement, accroître la concurrence et favoriser le déploiement de nouveaux concepts innovants, je ne suis pas sûr qu'on puisse en attendre un réel bénéfice sur l'emploi. Le territoire national est désormais bien équipé en commerces, en particulier dans l'alimentaire. Certes, la libéralisation encouragerait les groupes de distribution à satisfaire leur soif de croissance par l'ouverture de nouveaux magasins. Mais si le volume du marché ne suit pas, ces ouvertures entraîneront des fermetures en nombre croissant. Et si les nouveaux venus s'imposent sur la base de prix bas, ils afficheront une intensité en emplois plus faible que les enseignes en place. Enfin, il n'est pas sûr que l'effet sur la concurrence soit massif car seule l'entrée de nouveaux acteurs peut déstabiliser l'oligopole actuel. Or, étant donné l'importance des économies d'échelle, un nouvel acteur est contraint d'entrer d'emblée avec un réseau de taille significative, ce qui paraît peu réaliste en raison de la densité commerciale déjà atteinte. Je suis plus inquiet des conséquences indirectes de la libération des prix si la loi Galland devait être supprimée. Cela déclencherait certainement une guerre des prix. Pour renforcer leur compétitivité, tout en ménageant leurs marges, les distributeurs renforceraient encore leurs pressions sur les fournisseurs. Ils chercheraient à réaliser des gains de productivité. Les nouvelles technologies d'automatisation de l'encaissement leur offrent une formidable opportunité. Ainsi, pour un hypothétique gain de pouvoir d'achat, le prix à payer pourrait être la destruction de plusieurs dizaines de milliers de postes de caissières."
A suivre, mon "point de vue" à paraître dans la rubrique "Idées" des Echos...